Parfois il m'arrive de m'emporter pour notre choix de vivre à la Campagne. Le bon sens paysan qui coule dans mes veines s'exaspère de certaines leçons de morale. Je vous prie d'excuser mon verbe un peu haut !
Rats des villes, Rats des Champs…à mes yeux la fracture (la facture également) est là.
Fille d’un exilé de Franche Comté et d’une auvergnate creusoise (lourd passif), j’ai posé mes valises au cœur de la forêt de Sologne il y a 32 ans après 20 ans d’asphyxie parisienne…
Ce que nous vivons aujourd’hui, à mes yeux, est le fait d’une seule et même erreur : la centralisation.
Comment a-t-on pu vider nos campagnes de cette façon, couper autant de gens de leurs racines !
Nous avons poussé 1 agriculteur à en remplacer 50 pour nourrir toutes ces villes stériles.
Et aujourd’hui la pire des catastrophes se produit : les gens des villes expliquent aux gens des campagnes comment vivre !!!
Nous, campagnards, avec nos élevages de vaches méthanisantes, nos tracteurs et véhicules au diesel, nos champs de blé polluants, nos chiens malheureux de courir les bois, nos poules et coqs bruyants, nos chasseurs vidant les forêts, nous sommes les monstres dévastant la biodiversité.
Alors ce matin en me levant, je me suis demandé quelle était mon empreinte carbone, qu’allais-je pouvoir faire pour l’améliorer. Je prendrai ma voiture trois fois par semaine en réfléchissant à tout grouper lors de ces sorties pour ne pas perdre de temps, mais en déposant les courses chez mes parents pour leur éviter de sortir et le pain chez mon voisin.
Je mangerai des salades de notre jardin ainsi que nos tomates, peut-être un poulet que nous avons élevé au blé et avec les restes de nos repas ou bien un morceau de sanglier que mon compagnon a tué à l’affût et partager avec ses 4 copains (1 sanglier pour une semaine d’affût, sont pas doués nos grands prédateurs). Et puis nous avons aussi du raisin et des pommes sur notre terrain… nous ramasserons ce soir les œufs de nos poules et de nos cailles (pauvres petites bêtes élevées sur 1000m² de prés).
Je passerai ma journée à travailler à mon atelier pendant que Fabien coupera le bois de cet hiver (oui parce que dans la forêt il y a du bois mort que l’on coupe pour permettre la régénérescence naturelle), et puis notre voisin, agriculteur à la retraite (encore un qui a élevé des vaches méthanisantes pour nourrir les gens d’la ville), passera boire un « cht’i canon » en apportant des courgettes et on parlera des saisons, qui sont plus comme avant, du temps qu’il fera cet hiver, du brame qui a commencé, de la propriété en face « qui z ‘ont coupé à blanc la parcelle à côté de l’étang d’la motte pour replanter du pin laricio parc ’que ça résiste mieux à la sécheresse… (Encore un qui plantera une forêt qu’il ne verra pas grandir mais pour les générations suivantes peut-être) » et puis des rhumatismes fait pas bon vieillir et d’cette saloperie de virus… (en regardant mon paysan de voisin je me demande quelle est son empreinte carbone au niveau vêtements avec son vieux pull et son jean fatigué… il s’en fout ils sont confortables pour le jardin). Pour finir la journée on fera un petit tour en vélo, en prenant soin de laisser nos chiens à la maison pour ne pas déranger la faune (pauvres chiens enfermés sur 5000m² de terrain), pour aller écouter vers chez François si les cerfs brament, « et comme ça tu verras là où on a tiré le sanglier », tout fier mon homme, qui lui n’a pas tiré la petite laie suitée qui est passé sous son mirador.
Cette description n’est pas idyllique, elle est notre quotidien, un choix de vie proche de la nature, la vraie, celle qui est aussi belle que cruelle (regardez la prédation d’un renard sur un faon de chevreuil, les maladies qui déciment parfois les populations des grands animaux et vous comprendrez de quoi je parle)… la nature est puissante, dangereuse et fascinante, même si en Sologne elle n’est pas celle de la mer ou de la montagne.
Croyez-vous que nous avons envie qu’elle disparaisse ? Ne sommes-nous pas les mieux placés pour la défendre, nous qui la vivons aux quatre coins de la France, du berger, du forestier, du chasseur, de l’éleveur, de l’agriculteur, du photographe, du promeneur, du petit commerçant et des entrepreneurs de nos villages… ne sommes-nous pas des passionnés de nos modes de vie ?
L’Ecologie n’est pas un gros mot, elle a été injustement détournée à des fins politiques. Nous ne sommes pas les pollueurs et les assassins de la nature, nous vivons avec elle et par elle !
Et vous du haut de vos immeubles, de vos choix, de vos pollutions sonores, visuelles, atmosphériques… vous voulez nous enlever nos modes de vie !
Nous ne sommes pas parfaits puisqu’humains, mais cet été, une cinquantaine d’hirondelles ont éclos dans notre grange, les moineaux se nourrissent du blé des poules, et cet hiver mésanges et petits passereaux sortiront de la forêt pour se réfugier près de la maison si la saison est dure.
Et toi que feras-tu ? Que vivras-tu ?
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